Débat à l'Assemblée française sur l'idéologie du célèbre
héros de BD créé par Hergé il y a 70 ans José Luis Barberia. Le
Jeudi 4 Février 1999. El
Paìs page 64
Bien que l'entreprise
semble risquée, les participants - deux de droite, deux de gauche - ont
traité le sujet par l'humour et l'ironie, en mettant en avant la fervente
passion et le respect pour le personnage de Tintin, partagés par tous.
Certains, comme le député Jean-Marie Bockel, maire de Strasbourg et
ancien ministre, se sont sentis obligés de se justifier aux yeux de leurs
électeurs qui leur avaient reproché leur participation à un débat
qu'ils jugeaient futile. Bockel a expliqué que sa présence répondait au
désir de montrer son "admiration inébranlable, son adhésion
indestructible à ce personnage qui a imprégné notre enfance et, bien
plus que nous ne l'imaginons, nos valeurs culturelles et morales
d'adultes". L'ancien ministre a défini Tintin comme "un
reporter issu de la droite conservatrice, transformé en une espèce de
Che Guevara, défenseur de la révolution permanente". Un peu plus
provocateur, le parlementaire socialiste Yann Galut a annoncé que la
"gauche plurielle" française avait décidé de présenter
Tintin comme candidat à la présidence face à une droite décapitée
dirigée par Jacques Chirac. La proximité des élections européennes a
poussé le député de droite André Santini à proclamer que
"Tintin, tête de liste des européens, ça règlerait bien des problèmes".
Au total, les adversaires se sont efforcés de façon notable d'offrir une
vision contrastée de la personnalité et de l'évolution du personnage,
sans dissimuler le fait que dans des oeuvres comme Tintin au Congo,
le personnage partage largement le paternalisme coloré de racisme et la
vision colonialiste de son pays, la Belgique, et du reste des puissances
européennes. Certainement, le héros de Hergé s'est opposé frontalement
à toutes les "grandes idéologies" du siècle, et dans son
oeuvre ne manquent pas les dénonciations des excès du capitalisme, de
l'esclavage, du fondamentalisme religieux, du nationalisme exacerbé, de
l'oppression des faibles et des minorités. Les actes du débat
seront édités dans le mois qui vient dans un livre qui viendra s'ajouter
aux manifestations du centenaire du personnage de Tintin. |